Un nouveau concept d'endurance
    Le marathonien qui court entre 2h10 et 3h15, utilise comme principal carburant durant sa course, du glycogène musculaire et hépatique. Il peut, s'il est mal préparé, si sa course est mal gérée, ou si son aptitude à stocker du glycogène lui fait défaut, connaître l'épuisement complet de cette source d'énergie et "frapper le mur". Cet état peut survenir aux environs de 30 à 35km, sa vitesse chute alors brusquement de 3 à 5 km/h, et sa fin de course devient très pénible. Combien de marathons ont-ils été perdus à quelques kilomètres de l'arrivée?

    Paradoxalement, le coureur de 100km qui sait garder une vitesse régulière tout au long de sa course, ne connaît pas ce mur: la raison en étant qu'à vitesse moindre sa principale source d'énergie est tirée du métabolisme des graisses. Il arrive donc au terme des 100kms avec son stock de glycogène fortement entamé, certes, mais pas épuisé.

    Les coureurs de 20km et moins ne connaissent pas non plus cet état d'épuisement; la durée de la course n'étant ici pas suffisante pour créer une déplétion totale des stocks de glycogène préalablement constitués.

    Le marathon est donc une compétition tout à fait originale, et le marathonien doit posséder des qualités physiologiques spécifiques qui ne sont pas forcément les qualités que l'on demande à un coureur de 100km ou de 20km: paradoxalement, un bon coureur de 20km peut n'être qu'un piètre marathonien, mais un bon cent bornard, et ceci dans la plupart des cas sans le savoir, car peu nombreux seront ceux qui, après avoir essuyé un échec lors de leur premier marathon, oseront tenter l'aventure sur 100km.C'est un tort! car un organisme peu enclin à stocker de grosses quantités de glycogène, peut par contre très bien fonctionner en utilisant efficacement ses graisses, source d'énergie quasi inépuisable, et en tout cas suffisante pour courir plusieurs marathons d'affilée...

    Un nouveau concept d'endurance.

    Nous avions jusqu'à présent défini 4 aptitudes physiques pouvant être améliorées par l'entraînement: l'endurance, la résistance, la force et la vitesse; l'endurance étant la capacité à soutenir un certain pourcentage de sa consommation maximale d'oxygène (vo2max) sur des distances supérieures à 3000m. Son évolution en fonction de la distance est donnée Fig.2 (courbe verte). La baisse du % de vo2max est due à la baisse des réserves de glycogène d'une part, et à la capacité à brûler efficacement les graisses d'autre part. Ces 2 types d'endurance que nous appellerons endurance "glycogène" et endurance "pure" s'ajoutent pour former l'endurance "globale". Le graphique montre l'importance relative de ces 2 types d'endurance en fonction de la distance de compétition: nous constatons que pour 40km le déficit en glycogène (rouge) représente 10%, le déficit endurance pure(bleu) 25% qui font 35% qui est l'endurance globale(vert).

    Il résulte de ceci, que l'entraînement spécifique du marathonien sera différent de celui du cent bornard, dans le sens où il devra plutôt effectuer des séances longues en y incluant des fractions rapides de façon à épuiser sélectivement ses réserves de glycogène en vue d'une surcompensation de celui-ci au fil des entraînements. Il en va de même en matière de préparation diététique à la compétition, où il sera peut-être conseillé au coureur de marathon de suivre le Régime Dissocié Scandinave alors qu'il sera inutile pour le coureur de 100km.

                       Claude Crestetto